Project Description
Makeda
- Reine de Saba -
L'imagerie du Moyen-Âge me fascine beaucoup en ce moment. J'ai souhaité mettre en avant des femmes de cette période.
Le catholicisme a une vision très manichéenne des choses : le Bien et le Mal. En lisant des écrits, j'ai vite vu que même dans le Bien se trouve du Mal, et inversement. Je ne partage aucune foi pour aucune religion, j'ai donc dû lire beaucoup de choses. Je tiens à préciser que je ne prétendrai jamais m'y connaître sur le sujet. Mes illustrations n'en sont que mon interprétation personnelle.
Makeda, plus connue sous l'appellation Reine de Saba. Elle était dépeinte comme dotée d'une très grande beauté, d'un fort tempérament et d'une subtile sagesse, mais aussi très indépendante. Elle vénérait le culte du Soleil et non celui de Dieu, était souveraine de son Royaume et exerçait le pouvoir politique. Beaucoup de représentations médiévales européennes de la Reine de Saba la montrent avec une peau noire, bleue, et même pourpre. Et également, les Vierges Noires, effigies féminines de l'iconographie du Moyen Âge européen, étaient considérées comme les plus saintes et les plus belles représentations durant des siècles.
J'ai également mis en scène des animaux du Physiologus, premier des bestiaires médiévaux. Ici, le pélican, l'aigle, la belette (ou martre), l'hirondelle, l'agneau, et le cerf sont perçus comme étant des animaux du Bien, représentants de Dieu pour certains. Cependant, ces mêmes animaux sont pour certains tués par l'humain, en dépit de leur fonction "sacrée".
L'aigle (en héraldique l'aigle est féminine), symbole employé dès les croisades. Cette concurrente aérienne du lion peut régner sur les mêmes zones que lui, mais ce dernier n'a aucun pouvoir dans les airs, qui deviennent symboliquement un monde supérieur. Adoptée par l'empereur d'Orient, qui règne à Constantinople, elle symbolise le maintien virtuel des deux parties de l'empire (Orient et Occident). Elle est une allégorie de la Résurrection, et véhiculerait également l'âme des morts.
Le Cerf symbolise le Christ lui même et le conducteur des belles âmes vers les sommets de la Sainteté dans la tradition chrétienne médiévale. Il est la monture des saints, un symbole de longévité et de résurrection et est le médiateur entre le Ciel et la Terre grâce à ses bois. L'animal dont la puissance étonne encore aujourd'hui, avait déjà dans l'Antiquité la réputation de traquer les serpents et de les dévorer. Cela a contribué dans la symbolique du Bien contre le Mal et de nombreuses représentations de cerfs détruisant des serpents dans le nid virent le jour. Roi des forêts, le cerf est vénéré mais également chassé depuis des millénaires.
L'agneau symbolise l'innocence, la pureté, la douceur et la bonté. Il est à de nombreuses reprises très présent dans l'Ancien Testament. Animal fragile, son sang devait marquer les portes du peuple d'Israël afin de les épargner de la colère divine qui allait s'abattre sur tous les premiers-nés égyptiens. Il ne prendra pleinement sa force symbolique qu'avec le Nouveau Testament. Il y représente en images comme en message le sacrifice ultime du Christ pour la rédemption des Hommes. "Voici l'Agneau de Dieu, qui enlève le péché du monde". Ceci donne lieu à une tradition culinaire : dans les pays catholiques, on sert un gigot d'agneau pour le déjeuner du dimanche de Pâques.
La relation entre l'Homme et la belette est équivoque. D'un côté la belette représente le souffle, l'âme et la vie, la femme qui donne la vie. Les expressions "encore vive est la souris", qui signifie "nous sommes encore en vie", et "elle a le rat au ventre" pour dire d'une femme qu'elle est enceinte, font que beaucoup de noms de la belette signifient à l'origine "jeune fille, mariée, jeune femme". D'autre part la belette souffre d'une mauvaise réputation. Elle est mortelle dans un poulailler. Certaines croyances disent que si un porc est paralysé des pattes arrières, c'est que la belette lui est passée dessus. Si la belette passe sur le dos d'une personne ou d'un animal, ils ne pourront plus se relever, ou alors il y aura une déviation de la colonne vertébrale. Les Anciens croyaient également que la belette "conçoit par l'oreille et enfante par la bouche". De la même famille des mustélidés, l'hermine quant à elle est un animal apprécié au Moyen-Âge, comme beaucoup d'animaux blancs plus ou moins exotiques. De nombreuses riches tenues étaient également faites de fourrure d'hermine, sur laquelle sont parsemées les extrémités noires de la queue de l'animal.
Le pélican. Sa renommée naîtra d'une légende insérée dans le Physiologus, le premier des bestiaires chrétiens. Selon cette source, les petits du pélican réclamaient trop violemment leur nourriture à leurs parents et se virent tués d'un coup de bec. Trois jours après, pris de remords, ces parents indignes se déchirèrent alors la poitrine pour en arroser de leur sang les petits corps inertes et ces derniers retrouvèrent alors la vie... On dit que ce symbole tirerait son origine d'une pratique bien réellement constatée et qui fait de l'immense jabot de l'oiseau l'endroit même où la nourriture est régurgitée pour nourrir ses petits. Il n'en fallait pas plus pour qu'il devienne l'image métaphorique du Christ et de l'Eucharistie.
Dans l'imaginaire judéo-chrétien, l'hirondelle n'est rien d'autre que l'incarnation pure et simple de Dieu. Incarnation qui se fait homme pour sauver l'humanité. Elle préfigure ainsi la résurrection entendue comme une nouvelle naissance. Elle fait, à ce titre, partir du bestiaire de l'Annonciation. L'hirondelle symbolise donc la Renaissance, l'incarnation. Enfin, certains bestiaires et gravures mettent l'accent sur la capacité présumée de l'hirondelle à guérir ses petits de la cécité. C'est l'image du Seigneur, à l'époque, qui rend la lumière à l'homme aveuglé par le démon.
La Sainte Grenade est un clin d'oeil à la Sainte Grenade d'Antioche (en anglais The Holy Hand-Grenade of Antioch). Il s'agit d'une arme imaginaire apparaissant dans le film Sacré Graal ! des Monty Python. L'objet s'inspire du globe royal des joyaux de la Couronne britannique. Cet élément comique se base sur le contraste entre la sacralité de cet objet cité dans les textes religieux, et la destruction totale qu'il est réputé provoquer.
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